Hermès suite

J'étais un peu tendu en sortant de l'écurie, mais entendre Adriel et Sam se battre sur la meilleure façon de dresser et dirriger un cheval m'a tellement fait rire que j'en ai oublié mes appréhensions. Il faut dire aussi qu'Apache est un cheval très rassurant. Suivre les autres s'est trouvé moins difficile que je pensais une fois qu'on a compris le truc.
De nuit, la campagne prend un tout autre aspect. Et on n'entend rien. Ce n'est pas comme à la maison. On s'y sent vraiment bien. Pourquoi je n'ai jamais essayé avant?

- Vous sortez souvent de nuit à cheval?

De la buée s'échappe de ma bouche et j'en déduit qu'il ne doit pas faire bien chaud. J'ai l'impression de découvrir un nouveau monde et que je risque d'y prendre goût.

- Parce que franchement, c'est génial !

C'est vrai, j'adore aussi la campagne de nuit. Les sensations sont très différentes, on est obligés de s'en remettre à notre cheval puisqu'on voit beaucoup moins bien. Ca tisse des liens incroyables. Rien n'est vu, tout est ressenti. C'est une sensation que l'on n'a jamais, de jour, parce que de jour, on voit les choses alors on veut tout contrôler. La nuit adoucit tout ça, si on sait rester prudent. Pas de marais le soir, of course.

-Oui, on sort souvent comme ça après la tombée de la nuit. Surtout en été je dois dire. Déjà parce que dans la journée, on a cours, mais aussi parce que les chevaux ne dorment que quelques heures par jour, et c'est souvent vers les midis. C'est le soir qu'ils sont le plsu en forme, et en été, il fait plus frais. Je ne ferais jamais sortir Cloud par 35°, ce serait un meurtre. Et puis j'aime bien, la nuit. On se fait confiance, parce que lui, il voit, et pas nous. On est vraiment une équipe, sinon, c'est toi qui diriges et lui il suit ce que tu demandes. Là, il a plus de liberté.

Je souris:

-Alors, il est comment, Apache?

-C'est vrai, la nuit, c'est le moment parfait. Même si j'adore les balades de jour dans les marais. Faudra qu'on se fasse ça, un jour. Les bois la nuit, c'est cool aussi, mais on se fera ça quand tu sauras mieux monter.

Je lance un clin d'oeil à Nathaniel:

-Ca se passe bien avec Apache apparemment. Il est sympa, ce cheval, mais attention à toi si tu lui donnes un coup de cravache ou d'éperon. Je me souviens, Owen a essayé un jour, genre regardez moi je joue au cowboy: il en a été pour ses frais: à la flotte dans les marais et retour à pieds! J'étais à l'écurie, Apache est rentré tout seul au petit trot, fier de lui!

Sam s'agite dans son coin:

-Jouer au faux cowboy je voulais dire! Je sais que n'utilises jamais ni cravache ni éperons! Ce que tu peux être susceptible, toi, l'américain!

J'éclate de rire.

-Attends voir le savon que je vais te passer! Ce sont les européens qui utilisent la cravache! Et les éperons, nous, on n'en utilise jamais au ranch. Aller Cloud!

Je pousse Cloud en avant et le fais rentrer dans Merlin. Gagné, Merlin fait un monstrueux écart, effrayé, et fait mine de partir au grand trot. Il faut toute la science d'Adriel pour l'arrêter. J'éclate de rire. Je me suis permis cette farce parce que je savais qu'Adriel ne risquait rien, c'est un cavalier émérite.

-Tu vois, ils ont du répondant, nos chevaux américains!

Il éclate de rire et nous continuons la balade, joyeusement.

-Désolé pour ces querelles de clocher, Nathaniel, mais à chaque fois qu'on monte ensemble, avec Adriel, on se taquine. Faut dire, tous les deux, on a grandi dans un ranch, ou un haras comme on dit en europe. Mais avec des façons d'élever les chevaux aux antipodes. Les deux marchent, c'est juste une question d'endroit.

J'éclate de rire avec eux, parce que les voir se tirer amicalment dans les pattes, je trouve ça extra. Je repense à ce qu'Adriel a dit. Utiliser les éperons et la cravache avec Apache... C'est du grand n'importe quoi! Owen est un idiot et un abruti. C'est bien fait pour ses fesses.

- Pas la peine de t'excuser! Je ne suis pas tous les tenants et aboutissants, mais si vous avez grandit chacun dans un ranch-harras, je peux comprendre que ça vous tienne à coeur. Pour tout dire, j'ai l'impression d'entendre mes oncles parler voiture... ou football.

Ca fait des lustres que je ne les ai pas vus. Ca commence à me manquer, mais bon.

- Grandir avec les chevaux, ça a dû vous changer de venir ici. Rien à voir avec Pouldard, ou Pré au lard d'ailleurs. Ni le monde de la magie au final... Ca a l'air d'un univers à part à entière, avec ses codes et ses règles, même si on change en traversant l'océan !

J'essaie de prendre un air détaché, mais ca me ramène à une question qui m'obsède depuis sept longues années. Comment on gère les deux?

-C'est vrai, on doit être chiants avec nos histoires de chevaux! C'est vrai que moi, en tous cas, ça m'a bien changé. Je ne voulais pas partir de chez moi, pas quitter les chevaux et l'atmosphère si particulière du ranch. On est hors du monde là-bas, dans notre campagne du Kentuky, au milieu des chevaux. Mais d'un côté, je me dis que c'est peut-être un bien de m'être éloigné un peu du ranch: j'avais fini par devenir cheval, à force. Je décryptais mieux les envies et besoins des chevaux que ceux des êtres humains. Surtout que la campgne américaine, c'est pas franchement surpeuplé... Il y a plus de chevaux que d'hommes.

Je souris:

-Mais ça me manque bien sûr. Heureusement que j'ai pu emmener Cloud, je n'aurais jamais survécu sinon. Ne pas monter comme j'ai l'habitude de le faire, ne pas partager tout ça avec mon compagnon de route, ç'aurait été trop dur. Une partie de moi est encore et toujours cheval!

-En Irlande, c'est un peu différent. Bien sûr, je vis dans le connemara, c'est la campagne. Mais notre haras est aussi un grand club d'équitation, on voit des gens toute la journée. Et c'est moins isolé qu'aux états unis, les espaces sont beaucoup moins vastes. Mais l'ambiance y est particulière, c'est vrai. On vit au rythme des chevaux, des clients et des balades. Surtout l'été, on vit au rythme du tourisme et on passe pratiquement 20heures sur 24 avec les chevaux. L'hiver, c'est plus calme. Et puis bon, moi je suis à Poudlard depuis le début de ma scolarité, je me suis habitué. Je retrouve mes habitudes avec le haras pendant les vacances. Et moi aussi j'ai pu emmener mon compagnon: Merlin. Il a un caractère tellement bien à lui que je n'aurais pas pu le laisser, rien que parce qu'il serait mort de faim plutôt que de laisser quelqu'un le nourrir. Et qu'il n'aurait laissé personne monter sur son dos. C'est un sauvage malgré son air "cheval de cirque".

Merlin hennit et lève la tête deux fois pour corroborer mes dires. Quel clown, je ne m'en lasserai jamais!

Je souris en écoutant Sam et Adriel raconter leur passion pour les chevaux. Un lien aussi fort que le leur semble être extraordinaire, ça me laisse pantois. Ca fait vraiment envie, cette idée d'avoir un compagnon de route peu importe le monde dans lequel on vit.

- C'est formidable que vous puissiez continuer de vivre votre passion ici. Et c'est vraiment relaxant de parler d'autre chose que de querelles de maisons, de quidditch ou de magie pour tout dire. Pour une fois que je n'aurais pas à mentir à toute une moitié de ma famille sur ce que je fais de mon année scolaire... Je crois qu'à eux deux, vos chevaux ont l'air assez exceptionnels pour tenir en haleine la curiosité de mes cousins et qu'ils cessent de parler philo, physiques etc... Je risque vraiment de prendre goût à ces ballades...

Quitter Poudlard pour quelques heures, avoir une activité dont je n'ai pas à me cacher. C'est ça la vraie vie.

Je souris:

-Ah, toi aussi ça te saoule toutes ces histoires de maisons et de rivalités? Il y a des fois, j'ai vraiment envie de les baffer, tous, et de les enfermer dans la même pièce pour les obliger à se parler et à se rendre compte qu'ils sont tous des êtres humains! Il faut relativiser toutes ces luttes ancestrales, les poser sur la table et en faire un bon pot pourri pour le foutre à la poubelle! Ca ne veut plus rien dire toutes ces anicroches! On n'y comprend rien mais c'est pas grâve, on fait la guerre! Comme si on avait besoin d'être en lutte perpétuelle contre quelque chose pour ne pas s'ennuyer. C'est fatiguant. Et quand tu le dis, tu te fais assassiner par tout le monde!

Il faut que je me calme, là je commence à m'emporter. Mais ça me tue vraiment tous ces chichis qui datent de l'âge de pierre. Faudrait évoluer, c'est fini les galais aménagés!

- Tu parles! Et le pire dans tout cela, c'est que hors ceux dont les familles sont célèbres etc, tout tient dans la répartition d'un foutu chapeau parlant. Imagine si on met la moitié des Gryffondors chez Serpentard et vice versa, ils continueraient probablement de se faire la guerre entre maison, sans imaginer qu'ils pourraient se retrouver de l'autre côté.

Je me tait un instant, et réfléchis un instant. De toute façon, ces foutues guerres, on ne peut pas y échapper.

- Mais si tu veux mon avis, on ne fait pas exception. Ca doit être un rite de passage ou une bêtise du genre. Dans les collèges et lycées normaux, c'est la même chose, et ce n'est pas institutionnalisé comme chez nous. Ils trouvent d'autres raisons que leur hérédité et leur classe, c'est tout. Le seul avantage, c'est qu'ici, on nous fourni un guide de qui se méfier quand on arrive.

Enfin, ce n'est pas vraiment le cas, mais en moins d'une semaine, on nous apprends à se méfier des Serpentard et surtout de ne jamais s'interposer entre un Serpentard et un Gryffondor... Et si un Pouffy se fait prendre pour cible, fermer les yeux au maximum, histoire de ne pas devenir la cible à notre tour. Belle mentalité. Oui, tout compte fait, j'aurais été mieux dans un lycée normal.

hj: désolée, j'ai du mal avec Nath... donc je met toujours des lustres à répondre. :s

Je souris:

-Oui, c'est vrai. Poudlard n'a malheureusement pas l'apanage de la stupidité... Surtout dans les lycées américains, non?

Je jette un regard interrogateur à Sam, qui s'y connait mieux que moi, petit irlandais, dans ce domaine. En Irlande, en tous cas, là où je suis, l'école, c'est plus cool. Ce n'est pas notre vie, c'est juste un endroit où l'on passe quelques heures par jour.

-Disons que ça dépend des lycées. Mais c'est sûr que le lycée, c'est tout pour nous, américains: on y vit presque toute la journée avec les cours, les activités diverses et variées... Parce que si tu te contentes d'aller juste en cours, déjà tu n'es personne, et ensuite, c'est mort pour la fac. Les activités extra scolaires, ça se fait au lycée, c'est une autre façon de voir les choses. C'est une mini société avec ses règles et malheureusement, si tu ne rentres pas dans le moule, tu passes de très mauvaises années!